Nombre d’étudiants : 280
Période d’expérimentation : 01/2019 – 12/2019
Le projet « Challenge L2 » est parti du constat empirique que les modalités classiques des travaux pratiques (TP) ne favorisent pas l’initiative des étudiants, principalement en raison d’un trop fort cadrage des actions à effectuer dans un laps de temps limité. Dans le domaine des sciences expérimentales concernées par ce projet, le protocole de mesure est généralement indiqué dans un polycopié et doit être suivi pas à pas par les étudiants, les montages, s'il y en a, sont déjà préparés tandis que le traitement des données est indiqué et doit lui aussi être suivi pas à pas. Bien que cet apprentissage très cadré et encadré soit utile à un apprentissage rigoureux, il en résulte souvent, chez les étudiants, une absence de recul vis-à-vis de ce qu’ils apprennent et donc une difficulté à comprendre l’objectif général du TP. Ils rencontrent également une difficulté à relier les connaissances et compétences obtenues dans ces TP à celles enseignées dans les cours et TD de leur formation pour une future mise en application.
Partant de ce constat, l’objectif du projet « Challenge L2 » était de développer chez les étudiants la capacité d’élaborer par eux-mêmes un protocole de mesure ou une expérience adaptée, de choisir comment traiter les mesures/observations et comment présenter les résultats sur une problématique choisie. Il fut donc proposé que les étudiants, par groupe et en autonomie partielle, mettent en oeuvre un dispositif expérimental de leur choix et réalisent des expériences qui leur permettent d’extraire plusieurs mesures, sous la forme de valeurs chiffrées, et/ou d’observations qualitatives pertinentes, à partir desquelles ils peuvent élaborer un modèle simple en adéquation avec leurs résultats. Cette démarche, prenant la forme de « challenges », devait offrir aux étudiants a minima, une meilleure compréhension de la signification des mesures, observations et de leurs incertitudes, ainsi qu’une meilleure appréhension des risques de surinterprétation de résultats. Elle devait également permettre aux étudiants de développer un ensemble de compétences transversales (soft skills) non évaluées traditionnellement chez eux, en plus des connaissances acquises, en raison de la nécessité de s’adapter et de trouver des solutions aux difficultés rencontrées sur le terrain.
Pour sa mise en oeuvre, cette expérience s’est appuyée sur un projet expérimental élaboré en 2017, le « challenge de la physique en L2 », qui visait à rendre les étudiants de L2 acteurs d'un projet de mesures physiques, ainsi que sur le succès d’un autre projet DUNE-DESIR, « Smart », qui a permis de faire émerger une structuration solide autour d’un fonctionnement par équipe, et enfin, sur l’utilisation de ressources sur Moodle qui a permis de donner du rythme au projet.
Concrètement, le challenge en lui-même s’étendait sur 16 heures en présentiel, avec tuteurs et référents, selon des modalités variables selon les disciplines : en physique, par exemple, le challenge était déployé sur deux journées complètes. L’objectif était que les étudiants consacrent 30 heures au total au challenge. Les étudiants ont été associés par équipes et des ressources ad hoc leur ont été fournies (petits matériels, documents, experts à consulter). Le challenge était rythmé par des livrables à déposer sur la plateforme Moodle à des dates non négociables. Le choix fut fait d’adopter une réglementation solide avec des dates clés pour déposer les dossiers et des modalités d’évaluations claires afin d’assurer une ossature au projet.
Des ressources vidéo ont été conçues pour accompagner les étudiants.
Le projet s’est fortement appuyé sur la plate-forme Moodle afin de permettre aux étudiants de tenir un journal de bord destiné à détailler le déroulé du projet jour par jour et de remettre les livrables.
Un nombre important d’acteurs ont été mobilisés :
- Le projet a bénéficié du soutien d’un ingénieur pédagogique du Suptice, Clément Cariou doté d’une culture en physique et chimie, dont l’apport a été important sur la gestion du projet. Le fabmanager du Teachning lab de l’UBL, Laurent Mattlé a également suivi la construction du projet.
- Le Data Tank a participé à la construction du questionnaire d'évaluation de projet avec les deux autres pôles. Il a analysé les réponses au questionnaire, effectué des demandes à la scolarité pour récolter des notes tout en veillant au bon respect du RGPD.
- Le Living Lab a apporté une dimension recherche en pédagogie : Charleyne Caroff, doctorante en sciences de l'éducation sur le projet DUNE-DESIR, a étudié tout au long du projet les transformations des pratiques pédagogiques d'enseignants de l'équipe pédagogique du projet. En parallèle, Caroline Le Boucher, ingénieur de recherche en sciences de l'éducation, a menée une étude sur la transformation de l'engagement des étudiants dans les cours.
- Les étudiants se sont fortement impliqués dans les activités proposées de manière inventive et aucune difficulté à les faire adhérer au concept n’a été rencontrée. Une enquête de satisfaction a été réalisée par la Maison de la pédagogie auprès des étudiants : les retours ont été excellents, les étudiants insistant particulièrement sur la liberté de choix qui leur a été laissée, même si l’impact laissé sur eux à long terme a pu parfois paraître mineur.
- Enfin, l’appel d’offre DUNE-DESIR a donné de la légitimité à l’engagement et le projet a permis de favoriser les discussions pédagogiques au niveau de l’UFR, tout en s’inscrivant dans une culture du changement pédagogique qui s’installe à l’échelle de l’université. De nombreux enseignants ont adhéré à la démarche du projet et différentes disciplines ont pu s’en emparer, en dépit d’un manque de familiarité du fonctionnement par projet de certains enseignants. Challenge L2 a permis de constituer progressivement une équipe interdisciplinaire autour de lui et d’initier un effet transformant pour les filières concernées, même si cet effet fut fonction du nombre d'enseignants impliqués dans le projet et ne fut donc pas le même dans toutes les disciplines.
Si la porteuse du projet était relativement isolée dans les étapes préliminaires, Challenge L2 a suscité un engouement important permettant la constitution d’une équipe interdisciplinaire, composée d’enseignants et de membres de l’équipe DUNE-DESIR (Maison de la pédagogie, Data Tank et Living Lab). Le contexte a favorisé cette transformation, le projet bénéficiant d’une volonté explicite de l’université en faveur de la transformation pédagogique. L’existence de DUNE-DESIR a donc été indispensable à la mise en route du projet et a donné une légitimité forte à la porteuse et une forme de reconnaissance aux enseignants impliqués. Malgré tout, il a pu être difficile de convaincre certains collègues d’adhérer au projet.
Le rôle joué par la plate-forme Moodle a été important, dans la mesure où elle a permis une démarche de contractualisation avec les étudiants, ce que permettait moins l’usage du courriel.
Moodle permet en effet de paramétrer le rendu des livrables des étudiants, il n’est plus possible de les déposer après la date choisie par l’enseignant.
Des difficultés ont également été rencontrées. Considérant le nombre important d’étudiants concernés (280), il est difficile d’avoir suffisamment de tuteurs pour les encadrer. La solution qui a été trouvée est la constitution d’une formation doctorale pour appuyer ce projet, permettant d’avoir 10-12 tuteurs doctorants, soit un tuteur pour 3-4 équipes. Une autre difficulté a été de parvenir à trouver les créneaux nécessaires dans les emplois du temps.
- Présentation du Challenge L2 à l'AG du réseau FiGure, Cursus Master en Ingénierie (Juillet 2018).
- Présentation du challenge à un groupe de travail sur l'approche par projets à l'IUT de Rennes (Mai 2021).
- Article scientifique en cours sur les transformations des pratiques pédagogiques des enseignants portant le projet (Charleyne Caroff, doctorante en science de l'éducation).